Le blé s'envole à Chicago après l'arrêt des exportations russes :
Reuters le 05/08/2010 à 20:26
Les cours du blé sur le marché de Chicago gagnaient près de 8% en séance jeudi, tout près de leur plus haut niveau depuis deux ans, après l'annonce par la Russie de l'arrêt de ses exportations de céréales.
La sécheresse qui sévit actuellement en Russie, l'une des pires de l'histoire du pays, a dévasté les cultures dans plusieurs régions, ce qui se provoque depuis plusieurs jours une envolée des cours du blé sur les marchés internationaux.
Les investisseurs craignent en effet des tensions sur ce marché au cours des mois à venir en l'absence de l'un des principaux exportateurs mondiaux.
La FAO, l'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, a réduit mercredi d'environ 4%, soit 25 millions de tonnes, sa prévision de récoltes mondiales de blé pour 2010.
Si elle considère que l'offre reste pour l'instant suffisante, elle a averti que "si la sécheresse dans la Fédération de Russie perdure, cela pourrait poser des problèmes pour les cultures hivernales dans ce pays, avec des implications potentiellement graves pour les livraisons mondiales de blé en 2011 et 2012".
Le prix de référence du blé à Chicago a bondi de 82% depuis le 9 juin.
Jeudi, les achats paniques de fonds d'investissement et de traders sur le Chicago Board of Trade (CBOT) ont également porté sur le maïs et le soja, qui gagnaient respectivement 2,6% et 0,8%.
Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a annoncé jeudi la suspension des exportations de céréales et de produits agricoles transformés entre le 15 août et le 31 décembre, une décision qui s'applique aux contrats déjà signés.
Il a ainsi confirmé des informations rapportées auparavant par l'agence de presse russe Interfax, qui avaient déclenché la vague d'achats.
"L'annonce de Poutine a paniqué tout le monde (...). Personne ne sait jusqu'où on pourrait monter", a commenté Paul Haugens, vice-président de la société Newedge USA.
En milieu de journée aux Etats-Unis, le contrat à terme sur le blé pour livraison septembre gagnait 60 cents, soit sa plus forte hausse autorisée, à 785,75 cents, le plus haut niveau atteint ces 23 derniers mois par l'échéance la plus proche du marché.
DISTORSIONS
"Je ne serais pas surpris s'il prenait 60 ou 70 cents supplémentaires, voire davantage, au cours de la prochaine séance", a estimé Joe Bedore, de la société de courtage FC STone à Chicago.
Le Kazakhstan, un autre gros producteur de blé du bassin de la mer Noire, a dit anticiper une chute de 35% de sa récolte et étudiera d'ici la fin du mois une demande de Moscou de réduction de ses propres exportations.
Le géant international du trading Cargill a dit s'attendre à ce que de telles barrières commerciales créent des distorsions sur le marché mondial du blé.
Sur le marché européen Euronext, le contrat de référence novembre sur le blé de meunerie a culminé jeudi à 236 euros avant de terminer la séance à 223,25, en hausse de 6,8% sur la journée. Il affiche une hausse de près de 60% depuis la fin juin.
Le blé n'a pas encore retrouvé ses niveaux records de 2008, lorsque les cours à Chicago avaient dépassé 13,30 dollars le boisseau, dopés par les craintes d'une crise alimentaire mondiale.
Certains analystes jugent d'ailleurs que la hausse actuelle est exagérée, en soulignant le niveau élevé de l'offre mondiale après deux années consécutives de récoltes records.
L'absence du blé russe au cours des prochains mois pourrait par ailleurs bénéficier à d'autres grands exportateurs, américains ou européens.
"Un arrêt des exportations russes reviendrait à redistribuer les cartes du marché international du blé", estime un trader européen. "Cela ouvrirait d'énormes opportunités nouvelles de vente pour l'Europe de l'ouest et les Etats-Unis."
Mais la hausse actuelle des cours pourrait s'avérer exagérée, estime un professionnel français, pour qui le marché est alimenté par des éléments purement financiers.
"Quand le marché (de Chicago) gagne un dollar en quatre jours, ce n'est pas pour des raisons fondamentales", estime-t-il. "Le repli, s'il se produit, sera tout aussi sévère."
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