Même avec des prix super bradés comme en ce moment à New York, un homme de la campagne comme moi, préfère rester dans sa cambrousse, près des moutons et des chevaux!
FM
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Immobilier bradé, salaires en baisse : New York peine à se remettre de la crise
LE MONDE
26.10.09
New York Envoyé spécial
Un an après la disparition de Lehman Brothers, l'effondrement de Wall Street et le début d'une récession mondiale, Manhattan porte encore les stigmates de la crise.
"Regardez, on ne compte plus les offres de location de bureau", dit Lena Berkmann, agent immobilier sur Amsterdam Avenue. Sur Lexington Park, sur la 7e, la 8e, les vitrines vides et les grilles de boutique baissées continuent à enlaidir les rues. A tous les carrefours, les panneaux "A louer" défigurent les premiers étages des gratte-ciel.
John, un robuste Afro-Américain vendeur de tapis d'Orient sur Madison, liquide les stocks. "Avant la crise, les gens rentraient et cédaient à une impulsion. Aujourd'hui, ils ne rentrent même plus." Alors John cède le stock : "60 % à 70 % de réduction."
New York tout entier brade. Yona, elle, ce sont ses tee-shirts "I love NY" qu'elle solde au coin de Houston et Broadway. "Le business ne va pas fort ! Mais il irait mieux si vous m'en achetiez cinq pour 10 dollars." Or sur la 5e Avenue, on en trouve à 10 dollars... les dix.
C'est dans l'immobilier que la baisse des prix devient spectaculaire. Ce merveilleux penthouse de huit pièces au 935 Park Avenue, vendu en 2005 pour 4,5 millions de dollars (3 millions d'euros), remis sur le marché à 5,9 millions de dollars en mars 2008, a fini par trouver preneur début 2009. Mais à 3,6 millions seulement (- 39,4 % par rapport au prix demandé). Moins chic, ce quatre pièces de la 79e rue Est, a été vendu pour 765 000 dollars en septembre 2008, à l'orée du crash. Deux mois plus tard, le même appartement dans le même immeuble, restait invendu à 570 000 dollars (- 25,5 %). Il a été retiré du marché en mars.
Selon Fiserv, une société spécialisée dans l'information financière, le prix médian des transactions observées à Manhattan a chuté de 21,7 % en un an à 375 000 dollars. Une nouvelle baisse de 17,4 % est attendue d'ici à juin 2011.
Les surfaces commerciales aussi se négocient à la baisse. La demande pour des locations de boutiques de vente au détail avait augmenté de manière continue (+ 54 %) entre 2001 et 2008, indique une étude de la Chambre syndicale de l'immobilier de New York avec des prix allant de 84 à 129 dollars le pied carré (0,30 m2). Aujourd'hui la demande est en baisse de 11 %, avec des prix qui ne dépassent pas 115 dollars. Bien sûr, il s'agit là de moyennes. La baisse de la demande est de 29 % dans le quartier de Flatiron (sud de Manhattan). Sur Broadway, entre la 72e rue Ouest et la 86erue, la baisse de prix est de 24 % à 293 dollars le pied carré. A l'été 2008, dans cette zone, les commerces s'écoulaient sans peine à 384 dollars. Vers Herald Square, entre la 5e Avenue et la 7e, les prix ont chuté de 23 % à 508 dollars.
Il n'y a pas que les biens immobiliers qui chutent. Les salaires aussi. Nelly a été promue à un poste de direction administrative au sein de la banque Goldman Sachs au début de l'année. Mais son salaire a baissé, et elle n'a perçu aucun bonus en décembre 2008. "C'était la crise et il fallait être solidaire avec les départements les plus touchés par l'effondrement des marchés." Nelly n'a pas protesté. Voilà quelques jours, elle a lu dans le Wall Street Journal qu'en décembre prochain, des bonus énormes allaient être distribués. Elle en a discuté avec ses collègues : tous se posaient la même question : "Aurons-nous notre part ?"
Une étude du Centre des statistiques du travail a montré qu'au premier trimestre les salaires ont baissé de 23 % à New York City, contre - 10 % seulement à Mecklenbourg (Caroline du Nord) et - 11 % à Fairfield (Connecticut). Au plan national, les salaires ont baissé de 3 %.
Curieusement, le secteur financier semble le moins touché par la crise. Certes, le New York Times rappelle de temps en temps que des traders de l'ex-Lehman Brothers sont devenus pompistes en Floride, mais Philip, spécialiste de l'analyse des risques des produits dérivés chez Calypso, assure avoir vécu la crise par journaux interposés : "Mon style de vie n'a pas changé, mes amis ont gardé leur job, mon salaire est payé." Ses bonus ont sauté en 2008, mais il s'est partiellement rattrapé en renégociant le taux de son crédit immobilier. De 6,125 %, celui-ci est passé à 5,125 %.
David, 32 ans, est le survivant d'une cellule de dix personnes spécialisée dans le financement du cinéma au sein d'une des grosses banques de la place. "Les investisseurs abondaient, on levait de l'argent facilement, mais les bons films étaient préemptés par les studios à Los Angeles. Alors, quand la crise a éclaté, les pertes sont devenues évidentes." La cellule a été dissoute, le personnel licencié, mais David est resté. Avec son ancien patron, ils se taillent une part sur le marché de la restructuration d'entreprise. "Vu le nombre de faillites, c'est là qu'est le marché. On est payé par les créanciers au pourcentage des dettes qu'on récupère." David a remarqué que ses ex-collègues se sont tous recasés dans une banque. Il en a profité lui aussi pour renégocier le loyer de son appartement sur Battery Park. De 3 000 dollars par mois, celui-ci est tombé à 2 700 dollars.
Pendant la crise, Craiglist, le site mondial de petites annonces gratuites, a doublé son audience en un an, passant de 10 à 20 milliards de pages vues. Explication : beaucoup d'Américains bradent maison, vaisselle ou ordinateur pour rembourser leurs dettes.
Yves Mamou